Quel contraste par rapport à il y a dix ans ! En 1993, en pleine crise immobilière, on ne donnait pas un kopeck pour ce pays cher à Trenet. Aujourd’hui, suite à nos réussites, dont la victoire des Bleus en 1998, tout nous semble possible : «nous avons la victoire en nous ! » «We are the best...» laissent entendre certains professionnels (Conférence de presse du Conseil supérieur du Notariat, le 13 juin, lors de la presentation du site immoprix.com). Mais de qui se moque-t-on ? Dans le domaine foncier, par exemple, il est difficile de faire le renouvellement urbain car le processus de dépollution des friches industrielles est long et des «médiateurs fonciers» sont nécessaires pour faire avancer les choses (p.16). Il faut en outre perfectionner notre méthode de travail et prendre en compte les risques techniques et juridiques avant de vendre un terrain avec des vices de pollution... (p.18). Mais le plus grand chantier est de passer d’un système semi-administré (hors marché) à un système de marché : la valorisation du patrimoine foncier et immobilier des hôpitaux illustre cette difficulté française dans le domaine qui nous occupe (p. 21). Ce passage ou cette réforme (et non pas cette révolution !) nous offre une illustration d’un chemin semé d’embûches juridiques et économiques pour adapter nos outils et notre savoir aux mutations mondiales et autres mouvements de fond. Une série de problèmes existe : statut du personnel (fonctionnaire ou pas ?), politique de services publics avec la nouvelle donne juridique (suite aux lois Voynet, Chevènement, et SRU), moyens, et financement de l’urbanisation (p. 25). Une contradiction en ressort car on demande à chacun des établissements, des métiers, des corps, de faire comme s’ils étaient des entreprises comme les autres... or cela n’est pas justement le cas. Les exemples des notaires, des SEM, des HLM qui veulent le beurre (subventions et aides de la politique de logement en France) et l’argent du beurre (se comporter comme n’importe quel agent économique, qui rationalise son parc, qui fait du management et non pas de la gestion... et d’autres avatars tel le bench-marking). La contradiction revient également avec la construction européenne qui met la pression pour ouvrir les régies à la concurrence (p.8). Nous sommes ici devant un dilemme : faut-il un dosage de la planification à «la papa» des années 50 et 60 ou faut-il laisser les règles de Bruxelles agir sans aucun contrôle ? Mais ces deux questions doivent être analysées par rapport à la reformulation de l’intérêt général en 2002 et non pas celui des années 50 ou 60. Oui à la concurrence lorsqu’il y a des règles établies et respectées pour tous les acteurs.... en commençant par les grands groupes semi-publics. Or, les «acteurs» qui ont incarné la mission de service public ont fait une sorte de «hold-up» sur la chose publique et les législateurs ont laissé faire. L’habillage qui consiste à changer de vocable (service d’intérêt général en lieu et place de mission de service public) ne sert à rien sauf à dissimuler notre impuissance à mieux réfléchir sur l’avenir de notre système d’aménagement urbain et sur la promotion immobilière. Non, we are not the best sauf en football !

Par Eupalinos

 

*Nous ne sommes pas les meilleurs.